Dans le domaine de la Data Analytics orientée métiers, deux offres complètes retiennent l’attention en 2025 : Microsoft Fabric et SAP Business Data Cloud (SAP BDC). Ces plateformes analytiques unifiées proposent chacune une approche différente pour exploiter les données de l’entreprise. Sans tomber dans le buzz marketing, examinons les faits de manière pragmatique : quelles sont les forces de chaque solution, dans quels contextes les utiliser, et comment elles peuvent même cohabiter au service des métiers.
SAP Business Data Cloud en bref : le cloud data business par SAP
SAP Business Data Cloud (BDC) est la toute nouvelle plateforme Data & Analytics lancée par SAP en 2025. Il s’agit d’une solution cloud unifiée (SaaS) regroupant plusieurs services SAP existants et nouveaux : on y retrouve notamment SAP Datasphere (gestion de données et entrepôt cloud), SAP BW/4HANA (entrepôt de données SAP traditionnel, en option hébergée), SAP Analytics Cloud (BI & planning), l’assistant intelligent Joule (agent IA), ainsi qu’une intégration native de Databricks pour le traitement big data et le machine learning. En réunissant ces composants, SAP BDC vise à fournir un socle de données harmonisé avec contexte métier pour l’analytique et l’IA, particulièrement pour les entreprises déjà utilisatrices des solutions SAP.
Adaptation aux environnements SAP : Sans surprise, SAP BDC est optimisé pour les écosystèmes SAP. Il se connecte nativement aux applications SAP (ERP S/4HANA, SAP SuccessFactors, etc.) et réutilise les riches métadonnées métiers de SAP (modèles de données, indicateurs standards) pour donner du sens aux données. SAP met l’accent sur sa connaissance profonde des processus métier pour transformer les données en insights pertinents. BDC fournit d’ailleurs des data products préconstruits (jeux de données, modèles analytiques) et des « insight apps » prêtes à l’emploi pour de nombreux domaines fonctionnels, en s’appuyant sur SAP Analytics Cloud. Cela permet aux entreprises SAP d’accélérer la création de tableaux de bord et d’indicateurs métier avec un minimum d’effort, en profitant de contenus packagés basés sur les best practices.
Ouverture au-delà de SAP : Bien que centré sur les données SAP, BDC n’est pas pour autant une tour fermée. La plateforme se veut “ouverte” et extensible. Elle intègre par exemple nativement la technologie Databricks pour gérer des données non-SAP (datalake, fichiers, big data) au sein d’un lakehouse unifié. SAP BDC offre aussi des connecteurs et outils pour intégrer des données tierces : l’idée est de « connecter toutes vos données SAP et non-SAP » dans une solution SaaS unifiée (Source : sap.com). L’écosystème ouvert de SAP prévoit des intégrations avec des partenaires leaders comme Collibra (gouvernance des données) ou Confluent (streaming Kafka) afin d’élargir les capacités de la plateforme au-delà des seules solutions SAP. En résumé, SAP BDC est particulièrement à l’aise dans un contexte où le cœur du système d’information est SAP, tout en permettant d’incorporer d’autres sources pour offrir une vision complète des données d’entreprise.
Microsoft Fabric en bref : l’analytique unifiée tout-terrain
Lancé par Microsoft en 2023, Microsoft Fabric se présente comme une plateforme analytique unifiée de bout en bout pour l’ère de l’IAazure.microsoft.com. C’est une solution SaaS également, qui rassemble au sein d’un même environnement tous les outils nécessaires pour gérer un projet data du début à la fin. Concrètement, Fabric intègre des technologies bien connues de l’écosystème Azure/Microsoft : l’ingestion et l’intégration de données avec Azure Data Factory, le stockage et l’ingénierie de données avec OneLake (lac de données multi-cloud) et Synapse (ingénierie Spark, entrepôt data warehouse, analytics temps réel), la Data Science/IA ( notebooks Spark, modèles ML), et bien sûr la visualisation et le reporting avec Power BI. Le tout est interconnecté de manière transparente dans une expérience unifiée.
Transversalité et écosystème Microsoft : Microsoft Fabric est conçu pour être générique et polyvalent. Contrairement à SAP BDC, il n’est pas lié à un ERP en particulier : c’est une plateforme agnostique sur le plan technologique, capable de se connecter à un très large éventail de sources de données. En effet, grâce à Data Factory intégré, Fabric propose plus de 150 connecteurs prêts à l’emploi vers des sources cloud ou locales hétérogènes (bases SQL, applications SaaS, fichiers, API, etc.). Cette transversalité en fait un choix naturel pour les organisations dont les données sont dispersées entre différentes technologies ou éditeurs. De plus, Fabric est profondément intégré à l’écosystème Microsoft 365 : les utilisateurs peuvent facilement retrouver les données et rapports Power BI directement dans Teams, Excel, PowerPoint, SharePoint, etc., ce qui facilite l’adoption par les métiers habitués aux outils Microsoft.
En somme, Fabric s’adresse à un public large (ingénieurs data, data scientists, analystes, utilisateurs métier…) cherchant une plateforme unifiée pour tous types de données, dans la continuité des outils Microsoft déjà en place.
Peut aussi cohabiter avec SAP : La flexibilité de Microsoft Fabric lui permet également de s’intégrer dans un paysage incluant du SAP. Par exemple, il est tout à fait envisageable de connecter Fabric à des systèmes SAP via des connecteurs dédiés (API OData/ODBC, extracteurs SAP, etc.), afin d’y ingérer des données SAP et les combiner avec d’autres données de l’entreprise. Microsoft et SAP ont d’ailleurs une collaboration de longue date pour favoriser l’interopérabilité de leurs solutions (ex: certificats d’intégration, connecteur SAP pour Azure Data Factory, etc.). Fabric ne vise pas à remplacer les outils SAP Analytics dans leur terrain de prédilection, mais offre une option supplémentaire pour valoriser les données SAP aux côtés d’autres sources non-SAP. On peut ainsi très bien imaginer une cohabitation où les données SAP sont exploitées en parallèle par SAP BDC et par Microsoft Fabric, pour des usages complémentaires que nous aborderons plus loin.
Intégration des données : deux approches pour unifier les sources
Une des premières questions à se poser concerne l’intégration des données provenant de multiples sources (SAP ou non). Les deux plateformes offrent des solutions, avec des philosophies différentes liées à leur ADN.
SAP BDC : intégration “métier” des données SAP et au-delà. SAP Business Data Cloud excelle évidemment à intégrer les données des applications SAP de l’entreprise. Via SAP Datasphere (inclus dans BDC) et d’autres services, on peut se connecter directement aux systèmes SAP (par exemple S/4HANA, SAP BW, SAP SuccessFactors…) en profitant des vues métier existantes et des structures SAP. L’avantage est que les données gardent leur contexte métier SAP lors de l’intégration – les objets (ex: commandes, livraisons, factures) conservent leurs relations et significations. En outre, BDC permet d’intégrer des données non-SAP dans son lac de données central. Grâce à l’object store intégré (SAP HANA Data Lake Files) et à l’alliance avec Databricks, on peut charger ou virtualiser des données tierces (fichiers parquet, données data lakes externes, etc.) et les harmoniser avec les données SAP. SAP met en avant la capacité de connecter toutes les données SAP et non-SAP dans une solution unifiée sans avoir à sortir de l’écosystème. Cela réduit les besoins d’extraction et de duplication vers d’autres plateformes externes, évitant ainsi les coûts cachés et les délais liés à ces transferts.
En bref, pour une entreprise majoritairement SAP, BDC offre un hub central où rapatrier ou fédérer l’ensemble des données pertinentes, avec la promesse que l’intégration des données SAP y sera plus simple et plus riche en sens qu’ailleurs.
Microsoft Fabric : connectivité universelle et unification en lac de données. De son côté, Microsoft Fabric aborde l’intégration par le prisme de la diversité des sources. La plateforme embarque un service d’intégration (Data Factory) proposant 150+ connecteurs couvrant la plupart des technologies de données du marché.
Applications d’entreprise (y compris SAP via des connecteurs certifiés), bases de données SQL/NoSQL, services cloud, fichiers plats, flux IoT – rares sont les sources de données que Fabric ne peut pas brancher. Cette approche tout-terrain facilite la consolidation de données multi-cloud ou hybrides dans un lac de données unique appelé OneLake.
OneLake (fourni automatiquement avec Fabric) est un lac de données multi-tenant où atterrissent les données ingérées, organisées de façon cohérente et indexées pour être facilement découvertes et gouvernées.
Fabric unifie ensuite l’accès à ces données via divers moteurs (SQL, Spark, etc.) sans avoir à les déplacer de nouveau. En somme, l’intégration sous Fabric rime avec agilité et amplitude : on privilégie la centralisation des données disparates dans un lac unifié, avec une architecture cloud moderne, plutôt que l’optimisation spécifique d’une source en particulier. Pour une entreprise qui a des données réparties entre du SAP, du Salesforce, des bases Oracle et des fichiers Azure/AWS, Fabric fournit l’infrastructure intégrée pour tout connecter et tout analyser au même endroit.
Gouvernance et gestion des données : contrôle vs. ouverture
Intégrer des données massivement ne suffit pas ; il faut aussi garantir leur gouvernance, c’est-à-dire la qualité, la sécurité, la conformité et le suivi des données à travers la plateforme. Là encore, les deux solutions proposent des approches alignées sur leurs écosystèmes.
SAP BDC : gouvernance centrée sur le contexte métier SAP. Avec SAP BDC, les entreprises retrouvent les mécanismes de sécurité et de gouvernance propres à l’univers SAP. Par exemple, les modèles de données importés depuis SAP conservent les autorisations définies au niveau ERP ou BW, assurant que chaque utilisateur ne voit que ce qu’il doit voir. L’intégration serrée avec SAP Analytics Cloud permet de définir des règles de gouvernance au niveau métier (par ex. les indicateurs standardisés, les hiérarchies organisationnelles) et de les appliquer de façon cohérente dans les analyses. SAP BDC propose également un catalogue de données enrichi de sémantique : les data products définis sont documentés avec leur définition métier, ce qui aide à la compréhension et à la réutilisation des données. Pour élargir la gouvernance aux données non-SAP, SAP mise sur des partenariats : l’intégration avec Collibra notamment permet de gérer le catalogue et la qualité des données de façon avancée dans BDC. En résumé, la gouvernance dans BDC est très orientée “métier SAP”, avec la possibilité d’y adjoindre des outils spécialisés du marché. Ceci convient parfaitement aux entreprises voulant préserver la cohérence métier de leurs données de bout en bout, surtout si elles ont déjà des standards internes alignés sur SAP.
Microsoft Fabric : gouvernance unifiée via l’écosystème Azure. Microsoft Fabric, de par son ADN Azure, s’appuie sur les services de sécurité et gouvernance de Microsoft. L’authentification et les droits d’accès sont gérés via Azure Active Directory, offrant un contrôle fin des accès à chaque élément (datasets, notebooks, rapports). OneLake, le lac central de Fabric, indexe automatiquement les données pour en faciliter la découverte, le partage et la conformité réglementaire. De plus, Fabric peut être couplé à Microsoft Purview (solution de gouvernance de données Azure) pour cataloguer l’ensemble des données, tracer leur lignée (provenance) et appliquer des classifications/sensitivity labels. Chaque artefact créé dans Fabric (pipeline de données, modèle, rapport) peut être suivi et documenté, ce qui aide à garder la maîtrise sur l’écosystème analytique. En termes de sécurité, Fabric bénéficie de toute la pile Azure (chiffrement, gestion des clés, surveillance) et de l’intégration native avec les outils Microsoft 365 pour, par exemple, prévenir la fuite de données dans les rapports partagés (DLP). Ainsi, la gouvernance sous Fabric est intégrée par défaut et s’aligne sur les bonnes pratiques cloud de Microsoft. Elle sera familière aux équipes qui travaillent déjà sur Azure ou Power BI, et assure une ouverture nécessaire pour gérer des données très variées, au prix d’un effort de configuration possiblement plus technique initialement comparé à SAP BDC.
Analytique, BI et IA : quelles capacités pour les utilisateurs métier ?
Une plateforme analytique n’a de valeur que par les insights qu’elle permet de délivrer aux métiers, via des outils de Business Intelligence (BI), de visualisation ou même d’intelligence artificielle (IA). Comparons les offres de SAP BDC et de Microsoft Fabric sur ces aspects.
SAP BDC : SAP Analytics Cloud et l’IA métier intégrée. Du côté SAP, l’outil BI phare est SAP Analytics Cloud (SAC), inclus dans Business Data Cloud. SAC offre aux utilisateurs métier une interface 100% web pour créer des tableaux de bord interactifs, des visualisations et même des analyses ad hoc via du self-service. SAC est reconnu pour combiner à la fois de la BI classique (reporting, KPI) et des fonctionnalités de planification financière et simulation (budget, prévisions) dans le même outil – un atout pour les départements finance, RH, etc., qui peuvent à la fois analyser et planifier dans un environnement intégré. Avec BDC, SAP pousse encore plus loin l’IA intégrée dans l’expérience utilisateur grâce à Joule, son agent intelligent. Joule est un assistant IA (basé sur des technologies GPT, entraîné sur le contexte SAP) qui permet aux utilisateurs de poser des questions en langage naturel, d’automatiser certaines tâches ou d’explorer les données de manière guidée. Par exemple, Joule peut expliquer une variation d’indicateur, générer une prévision ou même déclencher des alertes automatiques en langage simple. Ces agents intelligents intégrés sont un différenciateur clé de SAP BDC : l’IA est mise au service de l’utilisateur métier de façon prête à l’emploi. Enfin, SAP BDC bénéficie des capacités de Databricks intégrées pour tout ce qui est data science avancée et AI/ML : les data scientists peuvent exploiter des notebooks, Spark et les bibliothèques machine learning au sein même de la plateforme, tout en restant connectés aux données business (via le business context SAP). En somme, pour les besoins analytiques orientés métiers SAP, BDC fournit un ensemble cohérent : des tableaux de bord packagés aux insight apps sectorielles, de la planification intégrée, et des agents AI (Joule) pour automatiser et guider l’analyse au quotidien.
Microsoft Fabric : Power BI et la puissance analytique polyvalente. Microsoft Fabric s’appuie principalement sur Power BI pour la couche BI et visualisation. Power BI est un des leaders du marché de la BI depuis plusieurs années (Leader du Magic Quadrant Gartner BI en 2023), apprécié pour sa richesse fonctionnelle et sa facilité d’utilisation par les analystes. Intégré nativement dans Fabric, Power BI permet de construire des rapports interactifs, des tableaux de bord dynamiques et même des analyses en langage naturel (Q&A) pour interroger les données. Les utilisateurs métier bénéficient de toutes les fonctionnalités avancées de Power BI (analyses assistées par l’IA, alertes, export vers Excel, partage via Teams). Là où Fabric va plus loin, c’est dans la palette complète d’analytique mise à disposition : au-delà de la BI, Fabric inclut des modules pour la data science (Synapse Data Science, avec notebooks Jupyter/Spark pour créer des modèles ML) et pour l’analytique temps réel. Ainsi, sur une même plateforme, on peut à la fois créer un modèle de machine learning sur les données du lac, l’exposer via un pipeline, et en visualiser les résultats instantanément dans Power BI. Pour l’IA chez MS Fabric, nous aurons l’incoutable MS Copilot à disposition dans l’ensemble des expériences.
Scénarios métiers : quand utiliser l’une ou l’autre, ou les deux ?
Après avoir vu les caractéristiques, comment choisir la bonne approche pour un cas d’usage métier ? En réalité, Microsoft Fabric et SAP BDC ne s’excluent pas mutuellement : chacune peut exceller dans certains scénarios. Voici quelques situations concrètes illustrant leur utilisation différenciée – et parfois complémentaire.
- Entreprise 100% SAP (scénario “SAP-centric”) : Pour une organisation dont la majorité des processus et données sont gérés par des solutions SAP (ERP, CRM, Supply Chain, etc.), SAP Business Data Cloud apparaît comme un choix naturel. Par exemple, une entreprise industrielle utilisant SAP pour la production, les stocks et la finance pourra avec BDC consolider toutes ces données dans un modèle unifié, et utiliser les insight apps fournies pour analyser sa chaîne logistique de bout en bout. La planification financière intégrée dans SAC permettra de faire du budget et du prévisionnel directement à partir des données réelles SAP. Dans ce contexte, Microsoft Fabric pourrait sembler moins nécessaire. Cependant, même dans un paysage très SAP, Fabric peut avoir sa place pour des besoins spécifiques : si cette entreprise souhaite croiser ses données SAP avec des données externes (par ex. des données de marché, des données météo influant sur les ventes, etc.), elle pourrait brancher Fabric en complément. Par exemple, les données SAP de production restent dans BDC pour le suivi interne, mais sont également extraites vers Fabric afin d’être combinées à des données IoT de capteurs machines, et analysées via un modèle IA dans Fabric. On le voit, dans un scénario SAP-centric, BDC serait l’outil principal pour tout ce qui est reporting standard et pilotage opérationnel sur SAP, tandis que Fabric servirait d’accélérateur ponctuel pour des analyses innovantes impliquant d’autres sources ou technologies.
- Organisation hybride (scénario “SI mixte”) : Prenons le cas d’une société de distribution dont le SI est réparti entre plusieurs technologies : un ERP SAP pour la gestion des achats et stocks, mais un CRM Salesforce pour la relation client, et des bases de données spécifiques pour la logistique entrepôt, etc. Dans ce contexte hétérogène, le défi est d’unifier la donnée pour avoir une vision 360° du business. Microsoft Fabric pourrait jouer le rôle de plateforme transversale : en connectant aussi bien SAP, Salesforce que les bases internes, Fabric permet de tout charger dans OneLake et de bâtir un data warehouse global. Les équipes data pourraient alors développer des tableaux de bord Power BI montrant, par exemple, la performance commerciale en combinant les données de commandes SAP et les opportunités du CRM non-SAP. Néanmoins, l’entreprise pourrait aussi tirer parti de SAP BDC en parallèle. En effet, certaines analyses pointues liées aux processus SAP (par ex. l’analyse des écarts d’inventaire ou l’optimisation des niveaux de stock) pourraient être réalisées plus rapidement dans BDC en utilisant le contenu pré-packagé SAP. Pendant que Fabric agrège les données pour une analytique plus large, BDC assurerait la cohérence métier et la validation des chiffres côté SAP. Les deux plateformes partageraient éventuellement des données de référence : on peut imaginer exporter les résultats d’une prédiction faite dans Fabric vers SAP BDC pour qu’ils soient intégrés dans un dashboard SAC, ou à l’inverse exposer un data model SAP BDC via un connecteur ODBC/OData pour qu’il soit repris dans Power BI. Ce scénario montre bien une cohabitation où chaque solution est utilisée selon ses forces : Fabric pour l’interopérabilité et la consolidation multi-source, SAP BDC pour la valeur métier immédiate sur les données SAP.
- Focus sur l’innovation IA : Dans un cas où une entreprise cherche avant tout à développer des cas d’usage avancés d’IA et machine learning (par ex. maintenance prédictive, segmentation client fine, moteur de recommandation produit), Microsoft Fabric offre un bac à sable idéal. Grâce à son intégration de Synapse Spark et de l’IA Azure, les data scientists peuvent itérer rapidement en exploitant des données variées. Imaginons une start-up ou un service R&D qui doit tester des modèles sur des données venant de systèmes SAP + d’autres sources open data : Fabric leur permettra de casser les silos et d’unifier ces datasets pour entraîner des modèles, le tout sans gérer d’infrastructure. SAP BDC, dans ce cas, pourrait ne servir que de source de données (en exposant les données SAP pertinentes) ou de point d’atterrissage des résultats pour les réinjecter dans les processus métier SAP. Par exemple, les scores d’un modèle d’attrition client calculés dans Fabric pourraient être renvoyés vers SAP BDC (via un partage Delta ou une API) afin d’être intégrés dans la vue client globale dans SAC. Ainsi, pour les projets très orientés Data Science/IA cross-domain, Fabric serait l’outil principal, et SAP BDC assurerait l’alignement au métier en récupérant les insights pour les rendre actionnables par les équipes métier SAP.
En résumé, le choix dépendra fortement du contexte de l’entreprise : si vos besoins sont centrés sur l’analyse de vos données SAP avec un maximum de contexte métier et des solutions packagées, SAP BDC est taillé pour ça. Si au contraire vos données sont éparses et que vous recherchez une plateforme générale pour tout unifier et innover (ou déjà bien ancrée Microsoft), Fabric sera un excellent candidat. Et dans beaucoup de cas, une approche combinée est non seulement possible mais souhaitable, pour tirer le meilleur des deux mondes.
Interopérabilité et cohabitation : adversaires ou alliés ?
Bien que Microsoft Fabric et SAP Business Data Cloud soient souvent présentés en opposition (Microsoft vs SAP), la frontière n’est pas étanche. Grâce aux standards ouverts et à des efforts des deux éditeurs, interopérer les deux solutions est envisageable.
Côté SAP BDC, l’ouverture passe notamment par l’adoption de technologies standard de l’écosystème data. Par exemple, SAP BDC utilise un format de lakehouse basé sur Delta Lake (via Databricks) pour stocker ses données dans l’object store. SAP a annoncé la possibilité prochaine de consommer les data products de BDC via Delta Sharing – un protocole ouvert largement supporté, ce qui signifie que des outils externes (comme justement Power BI, Python, etc.) pourront accéder aux données de BDC de manière sécurisée sans extraction complexe. De même, les API et connecteurs OData de SAP restent utilisables pour interroger les données depuis l’extérieur.
Côté Microsoft Fabric, l’ouverture est également un principe de base : OneLake supporte nativement les formats Parquet, Delta et peut même se connecter à des données sur AWS ou Google Cloud. Fabric est donc multi-cloud et “open lakehouse” par conception. Un modèle de données créé dans Fabric (par ex. un dataset Power BI ou une table lakehouse) peut être exposé via une API Rest, ou connectable via un pilote SQL standard (ODBC/JDBC) – ce qui ouvre la porte à sa consommation par des outils tiers, y compris potentiellement par SAP Analytics Cloud ou Datasphere si l’entreprise le souhaite. Microsoft travaille par ailleurs en partenariat avec SAP sur des connecteurs et solutions d’intégration. Des guides et outils existent pour intégrer des données SAP dans Azure (et donc Fabric) facilement. L’alliance SAP–Microsoft n’est pas nouvelle (programme Embrace pour déployer SAP sur Azure, connectivité entre Azure AI et SAP, etc.), et on peut s’attendre à ce que cette interopérabilité s’améliore continuellement.
En pratique, si vous souhaitez faire cohabiter SAP BDC et Microsoft Fabric, il est tout à fait possible de le faire via des mécanismes d’échange de données maîtrisés : connecteurs natifs, API, fichiers partagés, ou encore l’utilisation de zones neutres (data lake commun). L’important est de définir quelle plateforme joue quel rôle dans votre architecture : par exemple, SAP BDC peut être la “source de vérité” pour les données maîtres et indicateurs SAP, tandis que Fabric sert de bac d’exploration et d’enrichissement avec d’autres données. Ou inversement, Fabric centralise tout le raw data (données brutes) tandis que BDC se connecte à Fabric pour lire certaines données externes lorsqu’un besoin métier SAP l’impose. Les deux approches se valent, du moment que les responsabilités sont claires (éviter les doublons et les divergences de chiffres).
En définitive, Microsoft Fabric et SAP BDC peuvent être vus comme des alliés dans la quête d’une décision basée sur les données. Leur interopérabilité, bien que naissante, va probablement se renforcer (via des standards ouverts comme Delta Sharing, des partenariats cloud, etc.). Plutôt que d’y voir un duel frontal, il est souvent plus fructueux de les considérer comme deux briques complémentaires d’un écosystème data moderne, surtout pour les grandes organisations multi-logiciels.
Coûts et modèles économiques : à évaluer selon votre contexte
Un mot sur les coûts et le modèle de licensing, qui peut influencer le choix entre Fabric et BDC (ou la combinaison des deux). Les deux solutions étant des offres cloud managées (SaaS), on échappe aux coûts d’infrastructure classique, mais on adopte un modèle d’abonnement ou de consommation.
SAP BDC : SAP n’a pas encore détaillé publiquement tout le modèle de tarification de Business Data Cloud (lancé en 2025, la première moitié de l’année sert à préciser l’offre). Néanmoins, on sait que BDC remplace des produits existants comme SAC et Datasphere qui avaient leurs propres licences. Il est probable que SAP propose un forfait englobant une certaine capacité de stockage (notamment sur l’object store) et des utilisateurs SAC, avec des options en fonction des composants utilisés (par ex. activer l’option BW/4HANA PCE pourrait être un extra). L’intégration de Databricks dans BDC suggère aussi un modèle de facturation soit inclus, soit en sus pour la partie compute big data. Un des objectifs affichés de SAP BDC est de réduire le TCO (coût total) par rapport aux solutions purement on-premise ou full HANA en exploitant du stockage moins coûteux : par exemple, stocker des données chaudes dans l’objet store plutôt qu’en mémoire HANA revient bien moins cher et permet de gérer de gros volumes à coût raisonnable. Pour les clients SAP déjà engagés, BDC pourra représenter une optimisation financière en évitant d’acheter séparément un data warehouse tiers ou des outils de BI additionnels – tout en prolongeant la valeur de leurs investissements SAP (par ex. réutiliser des modèles BW existants dans le cloud via BDC au lieu de repartir de zéro).
Microsoft Fabric : Du côté de Microsoft, Fabric est actuellement inclus (en préversion) pour les clients Power BI Premium sans surcoût. À terme, le modèle s’aligne sur celui de Power BI Premium ou d’Azure : c’est-à-dire une facturation à la capacité (par nœud de calcul alloué, par heure) ou à la consommation de ressources. Microsoft a communiqué sur des unités de capacité F2/F4/F8 etc., avec un tarif horaire qui inclut l’usage de tous les services Fabric correspondants. Cela signifie que le client n’a pas à payer séparément pour chaque composant (ETL, base, BI…) : un certain niveau de capacité Fabric donne droit à utiliser l’ensemble, jusqu’à la limite de cette capacité. Ce modèle flexible et échelonnable convient bien, par exemple, à un démarrage modeste (on peut commencer avec une petite capacité pour un projet pilote, puis augmenter en fonction de l’adoption). Pour une entreprise déjà équipée largement en licences Microsoft 365/Power BI, l’ajout de Fabric peut être très compétitif par rapport à l’achat d’une solution séparée côté SAP, car il s’inscrit dans la continuité des contrats existants. En revanche, pour une entreprise pleinement SAP qui n’a pas ou peu d’infrastructure Azure, il faut prendre en compte le coût d’entrée dans l’écosystème Microsoft (formation, éventuellement services Azure additionnels comme Azure AD si pas utilisés, etc.).
En résumé, difficile de déclarer un gagnant côté coûts : cela dépend de votre point de départ (effet de synergie avec vos licences existantes), de l’ampleur des données à traiter et du nombre d’utilisateurs. Dans tous les cas, il conviendra d’évaluer précisément les besoins : par exemple, si vous n’avez besoin que de reporting sur données SAP pour quelques contrôleurs de gestion, la proposition de SAP BDC (incluant SAC) sera calibrée; à l’inverse si vous avez des data scientists, des analystes marketing et des dizaines de sources différentes, l’investissement dans Fabric sera rapidement rentabilisé. Une approche pragmatique consiste aussi à expérimenter (les deux solutions offrant des périodes d’essai ou des étapes pilotes) afin de modéliser le coût en fonction de vos usages réels.
Expérience utilisateur et déploiement : à qui s’adressent ces plateformes ?
Le succès d’une solution analytics dépend aussi de son adoption par les utilisateurs – qu’ils soient IT, data analysts ou directement utilisateurs métier. Là encore, Microsoft Fabric et SAP BDC offrent des expériences un peu différentes, reflétant leur orientation.
SAP BDC : pensé pour les “utilisateurs SAP”. SAP Business Data Cloud va sembler familier à ceux qui connaissent déjà les outils SAP. L’interface reprend en grande partie les éléments de SAP Analytics Cloud (pour la partie BI/planification) et de Datasphere (pour la partie modélisation de données), le tout pouvant être orchestré via un portail unique SAP. Un utilisateur métier SAP (par ex. un contrôleur, un analyste RH) retrouvera un environnement cohérent avec ce qu’il a en production, et pourra naviguer à travers des contenus déjà préparés par SAP ou par l’IT interne. L’expérience est assez guidée et pédagogique : SAP propose des stories (rapports interactifs) prêts à l’emploi et l’assistant Joule peut accompagner l’utilisateur dans ses questions. Pour les profils plus techniques (data engineer, BI), BDC offre également un cadre intégré mais attend de ces utilisateurs qu’ils aient une certaine connaissance de l’écosystème SAP (modèles ABAP CDS, notions de BW ou HANA, etc., selon les cas). En termes de déploiement, BDC étant un SaaS managé par SAP, la mise en route est relativement simple pour l’administrateur : on souscrit au service et SAP se charge de l’infrastructure. Toutefois, il faut prévoir un effort de configuration initial pour brancher les sources (connecter les systèmes SAP on-premise via des agents cloud, définir les espaces de travail, etc.) et pour adapter les data products SAP aux spécificités de l’entreprise. Globalement, l’expérience utilisateur de BDC est très appréciée dans un contexte où l’on veut rapidement délivrer du contenu métier sans trop de développements libres – c’est en cela une continuité de la philosophie SAP BW (pré-packagé) modernisée avec le cloud.
Microsoft Fabric : conçu pour la polyvalence et la collaboration. L’expérience Microsoft Fabric, quant à elle, se distingue par sa polyvalence et sa proximité avec les outils collaboratifs courants. Les utilisateurs de Power BI ne seront pas dépaysés, puisque l’interface de Fabric est intégrée à celle du service Power BI en ligne. On y gère des workspaces (espaces de travail) où cohabitent dashboards Power BI, pipelines de données, notebooks, etc. Un analyste métier pourra principalement interagir via les applications Power BI (web ou desktop) pour consommer ou créer des rapports. Un data engineer ou data scientist aura accès à des environnements familiers comme des notebooks Jupyter, du SQL, du Spark, directement dans le portail Fabric ou via des outils comme VS Code. Cette diversité des expériences est un point fort de Fabric : chaque rôle utilise l’interface ou l’outil qui lui convient le mieux, mais tous partagent le même espace unifié de données en arrière-plan. La collaboration est aussi facilitée par l’intégration M365 : commenter un rapport via Teams, co-éditer un pipeline de données, partager un lien OneLake… tout cela suit l’ergonomie bien connue des applications Microsoft. En contrepartie, Fabric demande peut-être un peu plus de “bricolage” initial pour créer les solutions analytiques : là où SAP fournit des modèles prédéfinis, Fabric vous donne la boîte à outils et c’est à vos équipes de concevoir les modèles de données, les mesures DAX dans Power BI, etc. Cela offre plus de liberté et de personnalisation, au prix d’un investissement en temps/hommes plus important pour arriver au même résultat final. En termes de déploiement, Fabric est aussi un SaaS – l’activation est quasi-instantanée (souvent juste activer dans l’administration Power BI)– mais la prise en main par toutes les parties prenantes peut nécessiter une conduite du changement (former les équipes data à Synapse s’ils ne connaissent pas, par exemple). Au final, l’expérience Fabric est très appréciée dans les environnements où l’on valorise la collaboration agile entre IT et métiers, et où l’on veut outiller différents profils autour d’un langage commun de la data (même plateforme mais multiples interfaces adaptées à chacun).
Tableau comparatif des points clés

Conclusion : complémentarité au service des métiers, au-delà du « buzz »
En conclusion, Microsoft Fabric et SAP Business Data Cloud apportent chacun des réponses solides aux défis de l’analytics moderne, avec des angles différents. Plutôt que de chercher à couronner un vainqueur, il est plus utile de comprendre comment tirer parti de l’un et de l’autre en fonction de votre environnement.
- SAP BDC représente le prolongement naturel de l’univers SAP vers le cloud data et l’IA, en capitalisant sur la connaissance métier accumulée dans vos systèmes. Il brille pour fournir rapidement des solutions prêtes à l’emploi aux utilisateurs métier dans un langage qu’ils comprennent, surtout si votre SI est déjà très centré sur SAP.
- Microsoft Fabric incarne une approche transversale et ouverte, idéale pour bâtir un hub analytique global. Il excelle dès qu’il s’agit de fédérer de multiples sources et de donner aux équipes data les moyens d’innover sans contraintes, tout en diffusant la culture data via les outils collaboratifs connus de tous.
Dans de nombreux cas, les deux mondes ne sont pas incompatibles : on peut très bien imaginer un paysage data où SAP BDC gère les rapports financiers officiels pendant que Fabric sert aux analyses exploratoires, ou où Fabric intègre toutes les données brutes pendant que SAP BDC fournit aux contrôleurs un cockpit de pilotage consolidé. L’important est de garder une vision centrée sur le métier : quelles décisions devez-vous éclairer ? quels utilisateurs doivent être autonomes ? La réponse à ces questions vous guidera pour assembler le meilleur mix technologique.
En clair, évitons le buzz et les positions tranchées : voici les faits – SAP BDC et Microsoft Fabric ont chacun leurs points forts. Le véritable enjeu est de savoir comment les combiner intelligemment pour créer de la valeur métier à partir de vos données, sans se perdre dans la complexité. Avec une approche pragmatique, ces deux plateformes peuvent devenir complémentaires et non concurrentes, au bénéfice d’une analytique d’entreprise plus performante et accessible à tous.
🔵 Sources Microsoft Fabric
- Microsoft Learn / Documentation officielle Fabric
📚 https://learn.microsoft.com/fabric
➤ Utilisé pour comprendre l’architecture de Fabric, ses composants (OneLake, Data Factory, Synapse, Power BI), sa gouvernance (Purview), et son modèle de capacité. - Blog officiel Microsoft – Introducing Microsoft Fabric
✍️ Arun Ulag (Corporate VP, Power BI)
📅 Mai 2023
📚 https://powerbi.microsoft.com/blog/introducing-microsoft-fabric/
➤ Pour les annonces clés, la vision « unifiée », l’intégration avec Power BI et les cas d’usage métiers. - Microsoft Ignite 2023 Sessions & Keynotes
📺 Disponible via https://ignite.microsoft.com
➤ Détails sur Copilot, l’intégration Fabric + M365, les modules IA et temps réel. - Documentation Fabric + SAP
📚 Microsoft Learn – Intégration SAP avec Azure Data Factory / Microsoft Fabric
https://learn.microsoft.com/en-us/azure/data-factory/connector-sap-hana
➤ Utilisé pour décrire la connectivité vers SAP. - Articles et posts communautaires – Nadim Abou-Khalil (MVP Data Platform)
📅 2023-2024
➤ Pour ses posts détaillés sur les différences Fabric / BDC, la gouvernance, la puissance de Power BI, la stratégie de Microsoft. (Ex. sur LinkedIn)
🟢 Sources SAP Business Data Cloud (BDC)
- SAP Newsroom – Annonce officielle de SAP Business Data Cloud
📅 Mars 2024
📚 https://news.sap.com
➤ Présentation de SAP BDC, ses composants, l’objectif d’unification Datasphere + SAC + Databricks. - Site produit SAP BDC
📚 https://www.sap.com/products/technology-platform/business-data-cloud.html
➤ Pour le positionnement marketing, les cas d’usage, la promesse d’intégration SAP/non-SAP. - Documentation SAP Datasphere + SAP Analytics Cloud
📚 https://help.sap.com
➤ Détails techniques sur la modélisation, les data products, la gouvernance, l’intégration Databricks. - Webinar SAP & Databricks – How SAP BDC Uses Open Lakehouse
🎥 Webinaire disponible sur SAP Events
➤ Pour la partie Delta Lake / Delta Sharing / extension via Databricks. - Partenaires SAP (Collibra, Confluent, Databricks)
🔗 Informations sur les intégrations natives avec les écosystèmes de gouvernance, streaming et big data. - Blog BARC (Business Application Research Center)
📄 SAP Business Data Cloud: What You Need to Know
➤ Analyse indépendante sur les promesses de SAP BDC, ses différences avec Datasphere ou BW/4HANA.
🟣 Sources croisées et comparatives / Interopérabilité
- Blog Deloitte – SAP BDC & Fabric, Future of Data Architecture
➤ Vision d’architecture data hybride avec BDC + Fabric, cas d’usage réels (industrie, pharma…). - LinkedIn / Blog personnel de consultants SAP & Microsoft
✍️ Experts comme Nicolas Raspal, Xavier Morcillo, ou Bastien Fenioux
➤ Retours terrain sur les usages combinés SAP + Microsoft. - Documentation Delta Sharing (Databricks)
📚 https://databricks.com/open-source/delta-sharing
➤ Utilisée pour expliquer la possibilité d’exporter des données SAP BDC vers Power BI/Fabric via protocole ouvert.
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